Avez-vous remarqué à quel point les mots nous impactent au quotidien ? Ils participent à se faire comprendre entre humains, exprimer des opinions ou encore à communiquer, oralement ou à l’écrit.
Les mots ont également leur importance dans le design d’interfaces. Un site web ou une application seront attractifs grâce à leur graphisme et leur ergonomie, mais sans les bons mots, l’expérience avec les utilisateurs peut être incomplète.
Prêtons-nous assez attention aux mots utilisés dans les interfaces de nos jours ? Et si la majorité des plateformes utilisaient des mots trop techniques, ou des termes uniquement voués à vendre ou à favoriser l’indexation des moteurs de recherche ?
Qu’est-ce qui a bien pu nous éloigner de l’humanisation de nos interfaces ? Après avoir laissé ce début d’article de côté il y a plus d’un an, je me suis (re)plongée dans le sujet passionnant de l’UX writing. J’avais envie de comprendre les enjeux de la rédaction dans l’expérience utilisateur, afin de remettre l’humain au cœur de la conception ! Rassurez-vous, je reste une ‘marketeuse’ dans l’âme, avec comme fidèle objectif la conversion, mais vous allez voir que les 2 ne sont pas incompatibles bien au contraire, et c’est ce que je trouve passionnant dans ce sujet !
Qu’est-ce que l’UX writing ?
Rendre la navigation des utilisateurs la plus fluide possible sur une interface de type site web ou application, c’est l’un des définitions de l’UX. Et cela passe par plusieurs ressources comme la recherche, le design UX et l’UX writing. Ce dernier moyen permet d’accompagner les utilisateurs dans leur navigation grâce aux textes présents au sein des interfaces. On parle également de microcopie en français.
Plus l’UX writing est réussi, moins vous avez conscience de lire ces textes car ils s’intègrent de façon fluide dans votre parcours : contenus courts qui guident pour cliquer au bon endroit ou soulignent un élément important par exemple.
L’UX writer travaille donc étroitement avec les autres équipes comme le marketing ou le design UI. Une rédaction simple et un ton éditorial cohérent avec la marque seront ainsi recherchés dans l’UX writing pour créer des contenus à forte valeur ajoutée pour les utilisateurs.
Dans l’exemple ci-dessous issu de l’application Alan, spécialiste de l’assurance santé en ligne, on comprend bien cette idée d’accompagnement par les contenus.
Grâce à un design simple, une navigation fluide et un ton rassurant et bienveillant (“car il n’y a pas de question bête”), l’expérience parfois inquiétante et complexe de poser des questions médicales apparaît comme accessible, simple et rassurante.
La différence avec le copywriting ?
Le copywriting est une technique de rédaction web très utilisée en marketing, pour servir la communication d’une entreprise ou d’une marque, et surtout pour inciter le lecteur à réaliser une action.
Le copywriter a de grandes capacités de rédaction, dans tous les secteurs et sous plusieurs formats : slogans, fiches produits, articles, emailing, affichage. Il possède également des connaissances en référencement naturel. Cependant, ses objectifs sont différents de ceux de l’UX writing dans la conception d’un site web ou d’une application, dans le sens où faciliter l’utilisation de l’interface n’est pas prioritaire. L’objectif reste orienté vente et marketing.
L’exemple de la page d’accueil d’Adobe ci-dessous utilise des techniques de copywriting, avec des termes attractifs et qui incitent à effectuer une action : ici, profiter de l’offre à -40%, mais à d’autres moments de l’année il peut s’agir de cliquer sur l’essai gratuit pour expérimenter le produit.
Même si le copywriting est présent sur le site d’Adobe, cela ne signifie pas qu’ils n’ont pas de recours à l’UX writing dans d’autres sections de l’interface. Les deux techniques s’avèrent ainsi complémentaires !
COPYWRITING | UX WRITING |
Orienté vente (ou marketing) | Orienté produit (ou design) |
En collaboration avec l’équipe marketing | En collaboration avec l’équipe design et l’équipe marketing |
Les mots pour attirer le client ou le motiver à acheter | Les mots pour guider les utilisateurs et simplifier le parcours |
Attirer l’attention au sein de l’interface ou améliorer le brand awareness | Améliorer l’utilisabilité de l’interface |
UX writing : accompagner l’utilisateur au sein d’une expérience globale
L’UX writer possède ainsi la casquette de copywriter, en apportant des éléments supplémentaires propres à l’UX comme la recherche et la compréhension de points bloquants dans la navigation, pour la rendre la plus agréable possible. L’utilisation de personas pour connaître ses utilisateurs reste indispensable, même en UX writing. Il est important d’avoir recours à l’UX writing lors de la phase de design, plutôt que de considérer cette discipline comme une surcouche de mots ajoutée en fin de processus.
En plaçant l’UX writing directement au début du processus de création, on s’assure ainsi de créer de la valeur sur l’interface pour les utilisateurs.
Parmi les enjeux principaux d’un bon UX writing :
- Améliorer l’expérience utilisateur et éviter la frustration
- Améliorer l’accessibilité
- Transmettre une information, sans la dissimuler
- Proposer une expérience innovante
- Simplifier la lecture : rédiger des contenus clairs et concis en utilisant des termes simples plutôt que du jargon technique ou des acronymes
L’UX writing intervient notamment sur des pages stratégiques de l’interface :
- Pages et messages d’erreur
- Boutons et menus
- Formulaire d’inscription et page contact
- Message de confirmation
- Tunnel de conversion et panier de commande
- Onboarding d’une application
- et bien d’autres…
Rédaction en UX et en marketing : un écosystème étroitement lié
Sur le schéma ci-dessous on note bien le lien étroit entre copywriting et UX writing, et la complémentarité de ces 2 disciplines.
La frontière étant si mince, pourquoi continuer de distinguer les 2 au lieu d’en faire une méthode combinée pour proposer les interfaces les plus faciles d’utilisation pour les utilisateurs qui sont potentiellement… des futurs clients ?
Un exemple que je trouve assez parlant :
Imaginons une entreprise qui fait de la publicité sur Google Ads, en réseau de recherche. Les annonces sont parfaitement rédigées, mettent en avant l’offre et sont attractives. L’utilisateur clique sur l’annonce et s’attend à trouver sur la page de destination la réponse parfaite à sa problématique, et un contenu en accord avec ce qui était mis en avant dans l’annonce (c’est ce qu’on appelle le message match), sans oublier une compréhension immédiate de l’offre et une facilité de naviguer pour prendre contact ou acheter par exemple. Si ce n’est pas le cas, que se passe-t-il ? L’utilisateur a de grandes chances de quitter le site immédiatement et de ne pas convertir. Résultats ? Des budgets Google ads dépensés sans ROI intéressant et des taux d’engagement sur le site limités.
Le problème ne vient alors certainement pas des campagnes publicitaires qui ont fait leur ‘job’ de faire venir sur le site : c’est le manque de clarté et d’UX optimale qui fait dégringoler les performances. Avec un bon UX + UX writing, l’utilisateur serait sûrement devenu client ! On voit ainsi que ce sujet est lié à tous les autres en marketing, et que toutes les techniques de communication fonctionnent encore mieux avec une couche d’UX.
Ces marques qui ont enrichi leur expérience grâce aux mots/grâce à l’UX Writing
L’UX writing de Backmarket pour marquer les utilisateurs tout au long de la navigation et sur tous les supports
Backmarket a compris qu’en racontant des histoires par les mots au sein de ses interfaces, elle se différencie d’Amazon ou de la Fnac, en sensibilisant les utilisateurs et en générant de la valeur.
Même pour une étape contraignante comme la création d’un compte et d’un mot de passe, Backmarket y apporte son ton humoristique et rassurant.
Sur tous les types de contenus, Backmarket applique le même tone of voice pour que les utilisateurs se sentent en confiance dans tout leur parcours.
L’UX writing de Mailchimp au moment de l’appel à l’action
Les utilisateurs les plus anciens de Mailchimp se souviennent peut-être de la phrase “This is your moment of glory” juste en dessous du bouton”envoyer” lors de l’envoi d’un mailing, ou encore du fameux “high fives” avec l’animation de la main du singe une fois que c’est envoyé. Un exemple de la bonne utilisation du contenu dans une interface produit, pour transformer un moment source d’anxiété pour des utilisateurs en une expérience plus plaisante !
Luko : l’UX writing pour rendre un service d’assurance habitation plus attrayant
Généralement, choisir une assurance habitation peut vite devenir un casse-tête : longueur des contenus, thématique ennuyeuse, complexité des offres… Luko a réussi à rendre ce service aussi simple qu’agréable à utiliser.
Spécialisé en assurance habitation depuis 2018, Luko bouleverse ce marché en amenant l’idée d’un accompagnement utilisateur à un tout autre niveau. Dans son interface, à travers le design et la rédaction, Luko propose un service qui simplifie le processus en se basant sur les besoins réels des utilisateurs.
Parmi ces éléments d’accompagnement, un formulaire à remplir en plusieurs étapes. Chacune de ces étapes est simple, courte et prodiguent des conseils afin que les utilisateurs comprennent bien les termes utilisés ou comment remplir le formulaire. Un ensemble d’éléments qui contribuent fortement à rassurer l’utilisateur.
Conclusion
L’UX writing consiste avant tout à considérer nos utilisateurs comme des êtres humains avec des émotions, des hésitations et des besoins, et non des machines.
La microcopie fait partie de ces disciplines sous estimées, mais reste l’une des pierres fondatrices d’une bonne UX, en participant à l’expérience utilisateur de la marque sur tous ses canaux et en regroupant plusieurs techniques : utilisabilité, image de marque, conversion…
Les techniques évoluent et s’adaptent, tout comme dans le SEO où il est possible (et fortement recommandé!) de rédiger un beau texte utilisateur qui soit optimisé également pour le moteur de recherche (plus besoin de faire du bourrage de mots clés et des textes de 1000 mots minimum 😉
Le marché de certains secteurs classiques comme les assurances ou l’immobilier ont-ils été révolutionnés grâce à la simplification des services ou grâce à la vulgarisation des contenus ?
Ce qu’on observe depuis plusieurs années, c’est que les utilisateurs se lassent des contenus trop complexes ou ennuyeux, et sont rassurés par la simplicité.
L’UX Writing ne serait-il donc pas la solution idéale ?
Merci à Margaux Pouget avec qui j’ai eu des échanges passionnants sur le sujet lors de notre collaboration chez Webians, et avec qui cette idée d’article a mûri !